La dame qui boit du whisky et parle d’art.
Juliette Roche vient tôt à la peinture encouragée par une famille de la haute bourgeoisie parisienne ouverte au monde foisonnant et cosmopolite de la nouvelle peinture. Après un passage à l’académie Ranson, elle fréquente, guidée par le touche-à-tout Jean Cocteau, filleul de son père, le groupe des Nabis (Paul Sérusier, Pierre Bonnard, Félix Vallotton, Maurice Denis…) dont elle aime l’idée que, pour ces artistes, la peinture peut être aussi décorative et agréable à regarder.
Juliette Roche s’éloigne de la mouvance Nabis dans les années 1910 lorsqu’elle découvre le travail résolument iconoclaste de Picasso (Les demoiselles d’Avignon) et de Georges Braque (Le grand nu.) Désormais convertie au mouvement cubiste elle y rencontre en 1913 Albert Gleizes qui travaille au sein d’un petit cercle formé de Juan Gris, Jean Metzinger, Robert Delaunay, Fernand Léger... Ces peintres inventifs et décomplexés veulent poursuivre à leurs façons les pistes nouvelles théorisées par Picasso et Braque - eux-mêmes prolongeant les découvertes de Gauguin, de Cézanne et de l’Art Nègre que Matisse avait fait connaitre à Picasso à son retour de Biskra (1905.)
Ces artistes, aussi jeunes que leurs illustres modèles, veulent s’affirmer face aux Maîtres et se font connaitre, non sans humour, sous le nom de Cubistes des salons par opposition au cubisme analytique originel.
Juliette, après avoir exposé ses œuvres, où pointe déjà l’influence du cubisme, au Salon des Indépendants (1913) et l’année suivante à la galerie Bernheim-Jeune, part pour les Etats-Unis à l’approche de la Grande guerre qui s’annonce. Elle s’installe à New York et épouse en 1915 Albert Gleizes qui l’a suivie dans son confortable exil.
Le couple rencontre le dadaïste Marcel Duchamp qui l’introduit dans le milieu de l’art new-yorkais (Alfred Stieglitz, Man Ray, Francis Picabia), des mécènes et de riches collectionneurs américains. Nombre d’entre eux d’ailleurs ont vécu à Paris où, la guerre finie, certains retourneront formant dans la capitale française ce qui a été appelé The lost generation comprenant essentiellement des écrivains.
Juliette, adoubée par ses nouveaux amis, se « spécialise » dans les natures mortes, les portraits de groupe et dans la représentation au charme certain de figures filiformes empruntées, la vigueur en moins, au cubisme renouvelé et accessible qui se développe à Paris et à New York, notamment auprès de son mari Albert Gleizes. Dans la conception proprement dite de ses tableaux elle s’affranchit de la perspective, du respect des proportions anatomiques et réduit la gamme des couleurs de sa palette tout en privilégiant l’usage dégradé et infini du gris, du vert, du bleu. Elle préserve dans ses réalisations une sorte de figuration stylisée, élégante et de bon goût qui se rattache à l’art de ses années d’apprentissage à Paris - comme la série de tableaux réalisés à New York puis à Barcelone où elle se rend à plusieurs reprises pour se rapprocher sans doute de son pays en guerre.
Certains des personnages à l’allure délibérément affectée figurés dans la production de la période hispano- américaine de Juliette Roche semblent évoluer derrière un mince voile à la tonalité passée, comme une brume mate éteignant ce qu’a de lumineux la couleur pure et franche, la matière et l’âme du groupe qu’elle a intégré et dont elle dit qu’elle s’en s’inspire en toute indépendance.
Cette dissidence insolite marque la césure entre son style, appelons-le syncrétique, et les toiles des peintres qu’elle admire pour la liberté de leur geste pictural. (Voir la galerie proposée en fin d’article)
Juliette durant son séjour américain partagera sa vie entre New York, Paris et Barcelone, peignant toujours mais n’exposant plus. Outre ses collages et le travail de la céramique, elle publie quelques textes, poèmes et romans aujourd’hui introuvables.
Elle retourne définitivement en France en 1927 où elle fonde avec son mari, à partir de sa maison familiale à Sablons en Isère, les « Coopératives artistiques et artisanales de Moly-Sabata », une résidence d’artistes toujours en activité sous l’égide de la Fondation Albert Gleizes dirigée par Christian Briend, actuellement conservateur au Centre Pompidou.
Juliette Roche cesse de peindre après la disparition de son mari en 1953.
Elle meurt à Paris en 1980 à l’âge de 96 ans.
Juliette Roche vient tôt à la peinture encouragée par une famille de la haute bourgeoisie parisienne ouverte au monde foisonnant et cosmopolite de la nouvelle peinture. Après un passage à l’académie Ranson, elle fréquente, guidée par le touche-à-tout Jean Cocteau, filleul de son père, le groupe des Nabis (Paul Sérusier, Pierre Bonnard, Félix Vallotton, Maurice Denis…) dont elle aime l’idée que, pour ces artistes, la peinture peut être aussi décorative et agréable à regarder.
Juliette Roche s’éloigne de la mouvance Nabis dans les années 1910 lorsqu’elle découvre le travail résolument iconoclaste de Picasso (Les demoiselles d’Avignon) et de Georges Braque (Le grand nu.) Désormais convertie au mouvement cubiste elle y rencontre en 1913 Albert Gleizes qui travaille au sein d’un petit cercle formé de Juan Gris, Jean Metzinger, Robert Delaunay, Fernand Léger... Ces peintres inventifs et décomplexés veulent poursuivre à leurs façons les pistes nouvelles théorisées par Picasso et Braque - eux-mêmes prolongeant les découvertes de Gauguin, de Cézanne et de l’Art Nègre que Matisse avait fait connaitre à Picasso à son retour de Biskra (1905.)
Ces artistes, aussi jeunes que leurs illustres modèles, veulent s’affirmer face aux Maîtres et se font connaitre, non sans humour, sous le nom de Cubistes des salons par opposition au cubisme analytique originel.
Juliette, après avoir exposé ses œuvres, où pointe déjà l’influence du cubisme, au Salon des Indépendants (1913) et l’année suivante à la galerie Bernheim-Jeune, part pour les Etats-Unis à l’approche de la Grande guerre qui s’annonce. Elle s’installe à New York et épouse en 1915 Albert Gleizes qui l’a suivie dans son confortable exil.
Le couple rencontre le dadaïste Marcel Duchamp qui l’introduit dans le milieu de l’art new-yorkais (Alfred Stieglitz, Man Ray, Francis Picabia), des mécènes et de riches collectionneurs américains. Nombre d’entre eux d’ailleurs ont vécu à Paris où, la guerre finie, certains retourneront formant dans la capitale française ce qui a été appelé The lost generation comprenant essentiellement des écrivains.
Juliette, adoubée par ses nouveaux amis, se « spécialise » dans les natures mortes, les portraits de groupe et dans la représentation au charme certain de figures filiformes empruntées, la vigueur en moins, au cubisme renouvelé et accessible qui se développe à Paris et à New York, notamment auprès de son mari Albert Gleizes. Dans la conception proprement dite de ses tableaux elle s’affranchit de la perspective, du respect des proportions anatomiques et réduit la gamme des couleurs de sa palette tout en privilégiant l’usage dégradé et infini du gris, du vert, du bleu. Elle préserve dans ses réalisations une sorte de figuration stylisée, élégante et de bon goût qui se rattache à l’art de ses années d’apprentissage à Paris - comme la série de tableaux réalisés à New York puis à Barcelone où elle se rend à plusieurs reprises pour se rapprocher sans doute de son pays en guerre.
Certains des personnages à l’allure délibérément affectée figurés dans la production de la période hispano- américaine de Juliette Roche semblent évoluer derrière un mince voile à la tonalité passée, comme une brume mate éteignant ce qu’a de lumineux la couleur pure et franche, la matière et l’âme du groupe qu’elle a intégré et dont elle dit qu’elle s’en s’inspire en toute indépendance.
Cette dissidence insolite marque la césure entre son style, appelons-le syncrétique, et les toiles des peintres qu’elle admire pour la liberté de leur geste pictural. (Voir la galerie proposée en fin d’article)
Juliette durant son séjour américain partagera sa vie entre New York, Paris et Barcelone, peignant toujours mais n’exposant plus. Outre ses collages et le travail de la céramique, elle publie quelques textes, poèmes et romans aujourd’hui introuvables.
Elle retourne définitivement en France en 1927 où elle fonde avec son mari, à partir de sa maison familiale à Sablons en Isère, les « Coopératives artistiques et artisanales de Moly-Sabata », une résidence d’artistes toujours en activité sous l’égide de la Fondation Albert Gleizes dirigée par Christian Briend, actuellement conservateur au Centre Pompidou.
Juliette Roche cesse de peindre après la disparition de son mari en 1953.
Elle meurt à Paris en 1980 à l’âge de 96 ans.
La centaine d’œuvres exposées au musée de Besançon en mai 1921 sous le titre Juliette l’insolite a été prêtée par la Fondation Albert Gleizes.
Oeuvres de Juliette Roche
Autoportraits
Tableaux
Juliette Roche - Promenade dominicale dans le parc du château, Huile sur carreaux de faïence contrecollés sur un panneau d'isorel, Georges Braque, entre 1919-1940
Les Maîtres